Quelques pistes pour comprendre les textes

Les textes de littérature orale, mythes, légendes, contes, fables, récits historiques, étiologiques, etc. sont des éléments importants pour connaître un peuple, sa culture, son histoire.
Pour maîtriser son univers, l'homme a besoin d'expliquer l'origine et la nature des phénomènes qui lui sont familiers, afin de pouvoir les classer.

Les récits étiologiques

Les récits étiologiques et les récits d'origine, tiennent donc une place importante dans l'univers des contes. Ils classent les phénomènes étonnants et essayent d'expliquer et de justifier les croyances et les institutions villageoises.
Le recueil présente un certain nombre de ces récits : la découverte de la femme, l'origine du mariage et de la procréation, l'origine de la polygamie, de la nourriture, de la sorcellerie, de la danse, de la souffrance, de la pluie, des pierres dans les rivières, etc. Dans le même contexte on trouve des textes qui montrent comment la coutume ancestrale a été modifiée, par exemple au sujet des sacrifices humains remplacés par un animal, ou bien simplement abolis. Les contes montrent l'origine de ces nouvelles coutumes.

Les enfant au centre des contes
Les enfants au centre des contes

Accompagner les enfants dans leur cheminement

Un autre ensemble de textes traite les problèmes, les tensions, les oppositions, les contradictions de la vie courante : relations difficiles entre chefferie et sujets, rapports conflictuels entre co-épouses, malheurs liés à la stérilité, place misérable des orphelins ou des enfants des marâtres.
Mais au-delà de ces préoccupations premières et immédiatement perceptibles, au-delà du message le plus immédiat, les contes ont une autre fonction : ils étaient l'un des moyens traditionnels que le groupe utilisait pour instruire, éduquer, accompagner les enfants vers l'age adulte.
Voilà pourquoi les enfants, les jeunes, sont souvent les acteurs principaux des récits. En écoutant l'histoire, l'enfant enregistre les comportements des héros et il a tendance à s'identifier au héros positif. En s'adressant surtout aux structures inconscientes de l'enfant, le groupe lui transmet enseignements et valeurs et lui modèle progressivement la personnalité en proposant un ensemble de normes reconnues et partagées par toute la communauté.
Plusieurs récits aident l'enfant à mieux se comprendre, se situer, à clarifier son monde intérieur, et surtout à ne pas avoir peur. La fonction principale de l'histoire est de rassurer, de rendre l'enfant confiant en l'avenir, de suggérer que le protagoniste atteindra toujours le but désiré même s'il doit traverser des moments difficiles, et franchir des obstacles et des épreuves pénibles : perdre ses parents, se retrouver avec une marâtre qui le fera souffrir, s'égarer dans la forêt, rencontrer des animaux féroces, des sorcières, des monstres, rechercher les cheveux d'un génie, etc.

Dans la vie il n'y a rien de gratuit

Les histoires ont toujours un dénouement heureux, mais elles suggèrent que dans la vie il n'y a rien de gratuit : tout peut être acquis et conquis, mais avec peine, fatigue, souffrance et souvent après une longue recherche qui peut durer longtemps.
Dans son chemin le jeune comprendra que dans ses épreuves il ne sera pas seul. Il rencontrera des êtres secourables prêts à l'aider.
Voici quelques textes qui éclairent ce cheminement intérieur : « Un monstre à tuer », « Trois cheveux pour épouser Philomène », « La fille à la main coupée ». Le premier récit présente trois enfants qui perdent leurs parents et restent seuls dans la forêt. Le cadet manifeste des comportements pervers et destructeurs. La vie dans la forêt, avec son exploration, représente un moment important dans le développement de la personnalité humaine
L'enfant pour acquérir sa personnalité et pour devenir complètement lui-même, doit explorer sa vie intérieure, mettre de l'ordre dans le chaos qu'il découvre à l'intérieur de lui-même pour mieux se comprendre. Au fur et à mesure que cette découverte s'opère l'enfant peut prendre peur, car il perçoit ses forces instinctuelles, ses pulsions violentes, agressives et destructives incontrôlables : il est alors désorienté. Les contes sont là pour l'aider ; ils invitent à ne pas avoir peur de la forêt, des animaux féroces et des monstres rencontrés.

Les enfant au centre des contes
Apprende à ne pas avoir peur

Apprendre à se connaitre et à ne pas avoir peur

La fable n'est pas un discours moral : elle ne fait qu'enregistrer les comportements humains. Souvent l'enfant a des sentiments violents et, parfois, il agit d'une façon asociale, dominé par des forces intérieures hostiles et contradictoires. Les aventures du petit frère reflètent exactement ce monde intérieur de l'enfant. Celui-ci doit apprendre à canaliser et utiliser ses énergies pour des buts positifs. L'enfant utilisera en effet les forces destructrices de sa nature et son désir d'indépendance pour tuer le monstre. Une fois éliminées les tendances destructives et asociales, les éléments les plus opposés de sa personnalité, l'enfant pourra acquérir la paix et avoir une vie heureuse.
On retrouve le même message, avec des tonalités différentes, dans l'histoire de l'orphelin, le mari de Philomène. Le jeune, parti à la recherche des cheveux des génies, doit demeurer et errer quatre ans dans la forêt où il rencontre celui qui lui fournira des conseils précieux pour accomplir ses tâches, résoudre ses problèmes, aider d'autres dans des situations difficiles, et rentrer enfin à la maison comblé de richesses et d'honneurs.
Il en est de même dans le conte qui donne le titre au récit. “La fille à la main coupée ” La marâtre coupe le bras à la jeune fille par pure méchanceté. La petite accablée par la souffrance, la douleur, l'amertume, s'en fuit en forêt et elle demande aux termites de la tuer. Elle rencontre une vieille au corps déformé qu'elle traite avec amabilité et délicatesse, et elle recevra des conseils précieux pour sa route. Elle se retrouve ensuite dans la maison d'une vieille à laquelle elle rend une faveur sans en être sollicitée. Grâce à sa bonté, disponibilité, serviabilité, mûrie et fortifiée par les épreuves endurées, elle ne refuse pas de rendre les services les plus humbles au corps meurtri de la vieille. Elle en sera largement récompensée : elle retrouvera son intégrité corporelle et rentrera à la maison avec des grandes richesses.
Les contes nous rappellent que dans notre personnalité il n'y a pas d'éléments négatifs : chaque tendance a sa fonction, chaque aspect est important et utile. C'est à chacun de nous d'intégrer et de dominer les aspects les plus discordants de sa personnalité. Les ressources intérieures, ainsi dominées et canalisées, deviendront des alliés précieux à notre service.